Comment gérer les conflits hiérarchiques au poulailler ?

Au-delàs des apparences bucoliques de leur allure placide, les poules vivent dans un ordre social fortement hiérarchisé ou il y a une chef dominante, un sous-chef, une sous-sous-chef et ainsi de suite… Forcément, pour établir cet ordre hiérarchique, les poules se battent et le font d’autant plus qu’elles disposent d’un espace restreint dans leur parcours, et plus encore au poulailler ! Voici ce que les propriétaires d’une basse-cour peuvent faire pour limiter les dégâts des conflits hiérarchiques, en particulier lors de la formation du groupe initial ou de l’introduction de nouvelles poules…

Comment déterminent-elles leur place ?

Lorsque deux poules qui ne se connaissent pas sont mises en présence, il est impératif pour elles de déterminer l’ordre hiérarchique qui régira tous leurs rapports futurs.

Lorsqu’elles sont présentées, un seul jaugeage suffit parfois, c’est-à-dire que la poule dominante va tenter d’impressionner l’autre, par des sons particuliers et une posture dominante assortie d’un gonflement des plumes du coup. Mais dans la plupart des cas s’engagent un combat plus ou moins acharné selon l’agressivité des partenaires. Lorsque personne ne veut céder, on assiste alors à un feu d’artifice digne d’un combat de coqs !

Il faut parfois plusieurs joutes espacées dans le temps pour conclure la hiérarchie définitive, dans le cas où aucune des poules ne veut lâcher la place de dominante. En général le combat au sommet se passe entre deux individus qui se disputent la première place, les autres regardent la scène de loin. La perdante du combat des chefs devra ensuite affronter les poules subordonnées les unes après les autres jusqu’ a ce qu’elle trouve sa place dans les rangs. Souvent épuisée par son dernier combat, elle peut ainsi se retrouver dans le bas de l’échelle. Aussi, dans nos petits poulaillers, quand nous formons un groupe initial ou que nous introduisons de nouvelles poules, ce phénomène se produit immanquablement. C’est pour cela qu’il va être nécessaire d’en tenir compte et qu’il ne faut pas l’empêcher pour autant.

La mémoire et la reconnaissance visuelle jouent un grand rôle dans la construction de la hiérarchie du poulailler. Chacune doit en effet se souvenir de sa dominante et de sa dominée pour adopter la bonne attitude et préserver son rang à l’intérieur du groupe.

Des études ont d’ailleurs montré que la mémoire et la capacité de reconnaissance visuelle de la poule étaient remarquables. Pour examiner et identifier précisément l’individu à qui elles ont affaire, les poules ne doivent pas être à plus de trente centimètres. Au-delà, elles ne perçoivent pas les signes distinctifs le classant comme dominant ou dominé par apport à elles. Cette trentaine de centimètres paraît être une distance de sécurité pour éviter d’offenser une dominante et la reconnaître avant d’être trop près d’elle et de risquer une remontrance d’un coup de bec.

De la même façon, les poules mémorisent leurs proches compagnes avec précision, afin de connaître leur position sociale exacte par rapport à elles. Elles se souviennent d’un individu précis (c'est-à-dire qu’elles sont capables de l’identifier comme connu et de se rappeler sa place dans la hiérarchie) pendant trois semaines. Ainsi, si on isole une poule, pour une raison ou une autre pendant moins de trois semaines (ça tombe bien c’est le temps d’une couvaison), elle réintégrera le groupe à la place où elle était auparavant. Cependant, passé ce délai elle sera considérée comme une étrangère et devra renégocier âprement sa place dans la troupe.

Quand on constitue une basse-cour avec des poules qui ne se connaissent pas…

Lorsqu’ on constitue un petit troupeau de poules qui ne se connaissent pas, il faut si possible les introduire ensemble dans la basse-cour et laisser faire les combats initiaux sans intervenir. En effet tant que la hiérarchie n’est pas établie, les brimades dureront et l’agressivité sera à son comble dans le poulailler. Quand chacune des poules aura trouvé sa place, l’agressivité diminuera et l’ordre se stabilisera jusqu’ au prochain événement perturbateur. Pour faciliter les choses et faire baisser l’agressivité ambiante pendant cette période, une astuce d’éleveur consiste à augmenter l’espace disponible du parcours ou de l’enclos. Cela offrira aux dominés la possibilité de montrer aux dominantes qu’elles sont bien désireuses d’obtempérer et de leur laisser la place comme elles doivent le faire. On multipliera aussi provisoirement les points de nourriture et d’eau, même dans des récipients de fortune, qui seront enlevés lorsque la paix sera à peu près signée.

Enfin, on rajoutera des planches inclinées ou des cachettes qui abriteront une poule apeurée pour qu’elle reprenne ses esprits hors de la vue de sa chef. Celle-ci pensera alors que l’autre exécute bien les ordres ou du moins se plie à ses desiderata. Dans la plupart des cas, les relations principales sont stabilisées en trois jours environ, même s’il y a encore quelques prises de bec de temps à autre pour bien mètre les pendules à l’heure. Bien sûr, il y à parfois des exceptions qui confirment la règle et certains cas ou le propriétaire de la basse-cour soit intervenir, car une des poules dominées vit un calvaire…

Quand on introduit de nouvelles poules dans un groupe existant…

Il n’est pas rare qu’au printemps on introduise une ou plusieurs nouvelles poules dans un troupeau déjà existant et installé depuis de longs mois à la basse-cour. Il va se passer les mêmes choses que lors de la formation du groupe initial pour trouver une place hiérarchique aux nouvelles venues. Hélas, la connaissance du territoire des poules primo habitantes va jouer en leur faveur. Pour limiter cet effet, l’Ideal serait de faire les présentations en terrain neutre, mais cela est quasiment impossible à faire dans la plupart des cas. Il est donc fortement recommandé de créer une séparation temporaire dans la partie abri du poulailler : grillage, mue, cage…

Ce dispositif permettra aux poules de se voir pendant quelques jours et la plus grande partie des relations hiérarchiques sera faite quand vous ôterez la séparation. Les brimades en seront très atténuées, voire inexistantes. Lorsqu'on ne peut pas séparer les nouvelles venues des poules "historiques", il faut utiliser les mêmes dispositifs que lors de la formation du groupe initial : cachettes, multiplication des points de nourriture et d'eau. La méthode de la séparation dans le poulailler est la plus adaptée pour que cela se passe au mieux lors de l’introduction de nouvelles poules. Il faut que les nouvelles sachent où elles dormiront dans leur nouvel environnement, s'habituent à la nouvelle alimentation et au nouveau soigneur. Et comme la poule revient toujours dormir là où elle a dormi la première fois, il est toujours intéressant de la mettre au bon endroit tout de suite. On s'évite ainsi d'avoir par la suite à aller "coucher" sa nouvelle poule tous les soirs parce qu'elle a dormi la première fois dans un autre endroit, à cause de la hiérarchie justement !

Il est préférable d’introduire au moins deux poules plutôt qu'une, car elles "partagent les coups", et se soutiennent mutuellement et créent entre elles des liens privilégiés face au groupe forme par les premières locataires du poulailler. D'ailleurs, l'adage populaire rural qui dit qu'il faut toujours un nombre pair de poules dans un poulailler vient très certainement de cette observation. Mais, en réalité, rassurez-vous, le nombre pair ou impair de poules dans le poulailler n'a aucune importance fondamentale sur leur vie. Seule la hiérarchie gouverne les relations entre les animaux.

 

Quand faut-il intervenir ?

En règle générale, au bout de trois jours, le gros des relations est établi entre des poules qui ne se connaissaient pas avant. Dans les jours suivants, les dominantes remettent encore les pendules à l'heure par un gonflement des plumes du cou, quelques cris menaçants ou quelques coups de bec pour bien rappeler les règles aux nouvelles venues, mais, guère plus. Ces dernières peuvent s'alimenter, boire et dormir à peu près tranquillement. Puis, tout s'arrondit au fil du temps et ce petit monde vit selon des règles bien établies, prêt à faire front contre de nouvel­les arrivantes.

Hélas, il est des circonstances où ça se passe beaucoup moins bien, souvent à cause d'erreurs de mise en place (espace insuffisant, absence de cachettes ...) où parce que l'on a une poule extrêmement dominante qui ne supporte aucune intru­sion. Ces cas sont relativement rares, mais ils peuvent se présenter. Il faut donc impérativement intervenir dans les situations suivantes et appliquer la méthode de la séparation.

Quand la nouvelle poule ou une des poules se fait battre par toutes les autres, qu'elle ne sait plus où se mettre (par manque d'espace) et qu'elle se met la tête dans un coin (pour protéger son crâne) ou encore ne bouge plus ni pied ni pattes. Devant son manque d’intégration et sa position de victime, les autres s'acharnent sur elle et finissent par la blesser jusqu'au saignement. Et hélas, on sait que le sang attise la frénésie des autres, au risque que les blessures et les coups répétés sur le crâne entraînent la mort de la poule battue. Elle est d'ailleurs dans un tel état de stress et de panique que son cœur peut lâcher lors des agressions.

Quand la poule est systématiquement écartée des points de nourriture et d'eau pendant trop longtemps et ne peut s’alimenter correctement.

Comment savoir qui est dominant ou dominé ?

Point n'est besoin d'être un grand éthologue pour savoir intuitivement qui est le chef clans le poulailler. La plupart des personnes qui regardent un peu vivre leurs poules le savent. Il en est de même pour le "bouc émissaire", celle qui est tout en bas de la hiérarchie. Cela demande plus d'observation pour repérer les poules du "milieu", notamment quand le groupe est grand. La poule dominante se repère très facilement au fait qu'elle est la première à la mangeoire et aux commodités, chasse les autres pour s'adjuger les meilleurs morceaux, se déplace librement dans le poulailler, distribue coups de bec et grondements agacés si une dominée ne s'écarte pas assez vite. Lorsqu'on introduit une nouvelle venue dans le poulailler, c'est la dominante qui va au contact. Son attitude est claire : elle est redressée, porte la tête haute en émettant un son particulier, gonfle les plumes de son cou pour paraître plus impressionnante. Elle se met ainsi en position d'ascendance physique pour être "plus haut que".

A contrario, les poules dominées doivent respecter la chef : s'écarter lorsque la dominante arrive pour lui laisser le passage, ne pas s'approcher trop près lorsqu'elle mange, attendre lorsqu'elle passe ... La posture est soumise : tête baissée, plus ou moins rentrée dans le cou, pattes fléchies pour paraître plus petites, c'est-à-dire "en dessous de". Ces signaux de soumission apaisent la dominante, lui confirment qu'on ne cherche pas à lui disputer sa place et évitent ainsi de nouvelles altercations.

Dans un combat, qui va gagner ?

Dans le cas de l'arrivée de nouvelles locataires, ce sont en général les poules qui habitent déjà le poulailler qui sont en meilleure posture. Elles sont en effet sur leur territoire. Leur connaissance du terrain et de sa disposition leur donne un net avantage sur les nouvelles arrivées qui ont de nombreuses choses à intégrer en même temps : "Où je suis ? Où est la sortie ? D'où vient le danger ? Où est la nourriture ? Où est l'abri ?". La motivation des primo habitantes est plus grande : elles défendent les ressources du territoire et elles ont moins d'interrogations auxquelles répondre en même temps. De plus, les expériences de domination ou de soumission vécues précédemment par les poules, qu'elles soient nouvelles ou anciennes, vont influer sur leur manière de combattre pour un rang. Si un individu a souvent gagné auparavant, il se battra avec beaucoup plus d'acharnement que s'il a souvent perdu. La couleur de la poule dominante dans le nouvel endroit peut aussi évoquer des souvenirs à la nouvelle, lui rappeler des victoires ou des défaites antérieures. Selon qu'elle s'est déjà fait battre par une poule de cette couleur ou, au contraire, en a déjà battu une, son implication dans ce nouveau combat va être différente. De manière générale, une poule plus âgée, qui a plus expérience, est avantagée. La taille n'est pas forcément un critère de victoire. Combien de fois n'a-t-on pas vu une petite Sebright au fort caractère faire son obligée une Brahma placide et dix fois plus grosse qu'elle. Les expériences et le caractère personnel paraissent donc plus déterminants que la taille pour l'issue du combat.

 

Poules et jardin : pascale Nuttall

Publié le 03 mar 2019

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